20120514

Master Marathon Queen-A Kind of Magic 1986

   Queen vient de remporter un immense succès avec son album The Works, le groupe est donc officiellement remis sur les rails et son image est maintenant nettement mieux maîtrisée. C'est un peu à ce moment que Queen devient réellement une institution, la critique est certes moins enthousiaste, le grand public se rassemble autour de morceaux plus pop et mieux adaptés au format radio tout en conservant un esprit rock. Queen a également plutôt bien réussi à prendre le tournant vidéo obligatoire au milieu des années 80 et ses clips, s'ils ne sont pas tous des chefs d'oeuvre, arrivent à marquer les esprits et constituent un large bonus pour l'image du groupe. Reste à voir désormais si l'innovation continuera à suivre, ou si au contraire, fier de cette franche consolidation des acquis, le groupe se reposera sur ses lauriers.

      A Kind of Magic.


   L'échec cuisant de Flash Gordon, le film comme l'album/B.O., a décidé le groupe à ne plus jamais retenter l'expérience de la musique de film. Cependant lorsque Russell Mulcahy leur présente son film Highlander, le groupe est visiblement séduit par cette histoire d'immortel écossais (bon en vrai il est français vu que c'est Christophe Lambert) qui se bat à l'épée contre ses semblables à travers les âges dans le but d'être le dernier d'entre eux et obtenir "le prix" (the prize en V.O)  qui consisterait en une sorte d'omniscience divine. C'est toutefois avec une approche différente de Flash Gordon que le groupe aborde cet album. Cette fois il n'est pas question de composer une suite de titres exclusifs à un film et majoritairement instrumentaux, cette fois c'est une véritable album, comportant 9 vraies chanson inspirées pour la plupart par le film.
 
   One Vision ouvre l'album avec une intro étrange empreinte de nappes de synthés et de voix distordues créant une atmosphère mystérieuse avant d'ouvrir sur un riff acéré de Brian May. La chanson est signée par la totalité du groupe car il s'agissait à l'origine d'un morceau de Roger Taylor inspiré par Martin Luther King (les paroles conservent encore un peu de l'influence du pasteur à travers son "I had a dream") mais les autres membres ont tous apporté leur influence ce qui fait qu'il ne reste pas grand chose du morceau d'origine. Roger Taylor ironisera sur le fait que "ce pourri de Freddie" a complètement modifié les paroles de la chanson. Il s'agit en tout cas d'un morceau pop-rock très énergique, qui ne dépareillerait pas aux côtés des Tear it Up ou Hammer to Fall de The Works. One Vision est dans cette continuité de morceaux enlevés, au rythme très marqué et aux synthés bien apprivoisés qui sont devenus à cette époque une marque de fabrique de Queen. Les paroles modifiés par Freddie Mercury mettent en avant le pouvoir de la volonté, mais lors des séances d'enregistrement le chanteur n'aura de cesse de meubler le texte avec des énumérations absurdes apparemment issues d'un menu de restaurant chinois et de son imagination.(one prawn, one clam...one sex position) De cela il ne reste que la conclusion absurde, la chanson se terminant en effet sur la phrase "gimme, gimme, gimme FRIED CHICKEN !". La chanson est donc parfaitement efficace, preuve d'une mécanique bien huilée et difficilement ébranlable quand le groupe se concentre vraiment pour se montrer sous son meilleur jour. Le morceau sera utilisé dans le film Iron Eagle, un film d'avions de chasse pas très mémorables, cependant le fait qu'il soit employé dans un autre film ne gène en rien la cohésion de l'album dont il constitue une introduction solide.
  A Kind of Magic donne son titre à l'album et c'est l'un des morceaux les plus connus du groupe. Roger Taylor en est l'auteur et comme souvent il s'agit donc d'un morceau à la rythmique très marquée, porté par des sonorités très synthétiques et quelques effets spéciaux...sauf que cette fois, ça fonctionne vraiment. Le morceau n'est pas exempt d'une certaine classe, très entraînant et possédant une atmosphère originale. Le titre est inspiré d'une réplique du film Highlander dont la chanson constitue, dans une version arrangée, le générique de fin. A sa sortie, la chanson est soutenue par un clip mémorable dans lequel les membres du groupe apparaissent en clochards squattant un vieux théâtre qui, une fois changés en musiciens par un Freddie Mercury magicien, entament un mini-concert entourés par une bande de groupies en dessin-animé. L'esthétique est celle de la pochette de l'album où les membres sont caricaturés vêtus de costumes jaunes.
  Freddie Mercury serait responsable d'une grande partie des arrangements étranges de ce morceau de Roger Taylor, il n'en reste pas moins que le batteur signe enfin ici un des morceaux clef du groupe, efficace à souhait et directement placé au rang des incontournables du groupe.
   One Year of Love, chanson qui apparaît dans le film Highlander (dans le bar), est un morceau de John Deacon. Il s'agit d'un slow très conventionnel pour les années 80, qui n'oublie pas le traditionnel saxo de circonstance dés qu'il s'agissait de créer une atmosphère romantico-sensuelle à l'époque. Même si les paroles sont empreintes d'une certaine mélancolie, elles tombent quelque peu à plat et le morceau cumule les clichés de cette période. John Deacon nous a habitué à une certaine naïveté mais cela a toujours été contrebalancé par un grand sens de l'efficacité, ce qui n'est pas vraiment le cas ici. Brian May est totalement absent ici, cédant sa place à des arrangements de cordes et le fameux saxophone. Freddie Mercury donne ce qu'il a mais ne relève pas une chanson très banale et facilement oubliable.
   Pain is so Close to Pleasure porte de nouveau l'empreinte de John Deacon, cette fois secondé par Freddie Mercury qui co-signe le titre. C'est une chanson à l'ambiance soul, portée par des synthés clavencinants (oui madame, clavecinants !) et la voix d'un Freddie Mercury usant du falsetto comme il ne le fera d'ailleurs plus jamais désormais. Le morceau n'est encore une fois pas du tout de ceux qui restent dans les mémoires mais il a le mérite de bénéficier d'une atmosphère plutôt originale dans la discographie du groupe. Le ton est assez proche de celui de la Motown, adulée par John Deacon, et c'est, malgré son titre, un apport de fraîcheur au milieu de l'album.
   Friends Will be Friends est encore une co-signature Mercury/Deacon, et cette chanson voit le retour de Freddie Mercury au genre de balade universelle qu'il affectionnait dans les années 70. Ce type de chanson ne réapparaîtra plus vraiment dans la discographie du groupe et se rapproche de titres comme Play the Game ou surtout We Are the Champions dont elle est une copie maladroite. En effet, la chanson semble vouloir être un des hymnes qui ont fait le succès du groupe avec un message fédérateur, en réalité c'est un morceau peu inspiré, avec un solo un peu mollasson. La chanson n'est pas incluse au film ce qui est assez étonnant car elle a cette teinte années 80 qui sied assez aux productions de l'époque.
   Who Wants to Live Forever est quant à elle totalement liée au film Highlander dont elle constitue quasiment le thème principal. Création de Brian May, la chanson évoque la douleur de la perte de ses proches, d'autant plus inexorable de par l'immortalité du personnage principal du film.


Durant le morceau, le groupe est rejoint par un orchestre symphonique et des choeurs, ce qui est une première pour le groupe qui a toujours apprécié ces ambiances sans jamais sauter le pas. Le thème empreint de tragédie gagne en ampleur à mesure que progresse le morceau pour lui donner toute la dimension épique qui sied à une grosse production. Malgré ces ajouts extérieurs le style du groupe est préservé au sein d'une chanson qui se présente comme un duo entre Brian May et Freddie Mercury au chant. Alors oui, c'est un peu pompeux, le synthé en guise d'orgue, les violons, les choeurs, mais après tout c'est un peu ce à quoi Queen nous a habitués par le passé. Certes il y a dans ce morceau un peu moins de second degré (en fait il n'y en a pas tellement) que durant la période A Night at the Opera, mais le groupe réalise ici une ambition qu'il n'avait fait qu'effleurer jusqu'ici. La basse de John Deacon est absente du morceau, le rôle étant tenu par une contrebasse. Au cours du film, le morceau sera repris à plusieurs reprises dont une version instrumentale qui n'a rien à envier aux productions habituelles pour ce genre de film.
   Gimme the Prize (Kurgan's Theme) marque une rupture très nette après ce morceau. Très percussive (à tous les sens) cette chanson est une incursion heavy-metal destinée à accompagner le personnage du Kurgan dans Highlander qui est très très méchant il faut se l'avouer. On peut d'ailleurs entendre quelques unes de ses répliques au cours de la chanson qui s'ouvre sur un message d'information radiophonique tiré lui aussi du film. C'est une chanson très proche de Princes of the Universe dont elle partage la rythmique dominante. Appuyé par des effets sonores du film, la chanson nous offre un solo enlevé de Brian May qui semble plutôt bien s'identifier au thème.

Vous voyez qu'il est méchant, on dirait un membre des Misfits. (Clancy Brown, le Kurgan)


Il est rare que Queen produise un morceau aussi agressif, surtout à cette période, et s'il tranche (ah ah ah !) avec le reste de l'album il n'en est pas moins entraînant et efficace. Freddie Mercury vocifère les paroles qui rappellent un peu celles de Seven Seas of Rhye avec un cabotinage non dissimulé. Cerise sur le gâteau, au milieu de l'explosion finale, on peut entendre notre bien aimé Christophe Lambert national déclamer un menaçant "Zere can bi onli wone !" du plus bel effet !
   Don't Lose Your Head est un morceau de Roger Taylor, oui c'est un de ceux-là. Rythmique redondante, thème naïf et transposition ultra littérale du sujet du film, tout est là. A bien l'écouter elle est plutôt drôle si on passe au-delà de sa répétitivité pénible. Grâce à la voix de Freddie Mercury elle prend par moment un peu plus d'altitude, par exemple au moment du break "don't drink and drive my car..." qui rappelle un peu tout à la fois les morceaux de Roger Taylor sur The Works et le Love Kills de Freddie Mercury en solo pour Metropolis (on en a parlé dans l'article précédent vous suivez ou pas ?). Rien de très mémorable si ce n'est la voix menaçante de Roger Taylor peut-être enroué, qui répète à n'en plus finir le titre du morceau.
  Princes of the Universe clôt l'album relativement bref avec un souffle épique rarement égalé. Il s'agit de l'autre morceau attitré du film dont il constitue le générique de début (et celui de la série, oui, oui celle-là) pour notre plus grande joie. La chanson possède une rythmique très appuyée proche de celle de We Will Rock You par exemple, du moins dans son introduction qui ferait trépigner de jubilation n'importe quel ado à sa sortie. On a l'impression que la batterie de Roger Taylor (qui nous redonne d'ailleurs du choeur suraigu et fantomatique comme il aime tant -et nous aussi, allez-) fait 20m de haut tant elle est impressionnante de puissance. Les choeurs à trois voix font leur grand retour de la plus belle manière à de multiples reprises. La tension est palpable et l'énergie ne demande qu'à se déverser en un flot irrésistible. C'est exactement ce qui se produit une fois la première moitié de ce morceau à tirroirs achevée. Brian May nous offre un de ses tous meilleurs solos, échevelé et aérien, il n'a pas à rougir de la comparaison avec ses meilleures estocades des années 70. On avait un peu perdu l'habitude de ce souffle épique qui portait parfois les morceaux de Queen, Princes of the Universe vient nous raffraîchir la mémoire. Le thème s'y prète bien et Freddie Mercury est au meilleur de sa forme lorsqu'il nous invective une nouvelle fois d'une manière qui peut rappeler Seven Seas of Rhye. Queen a débuté avec des chansons empreintes d'une mythologie épique et onirique, il semble que sur cet album ces influence parviennent à refaire surface pour le plus grand bien des fans de la première heure. Dommage seulement que la chose n'ait pas été plus poussée sur le reste de l'album qui se montre parfois à la limite de la paresse. A noter dans le clip la présence de Christophe Lambert qui se joint au groupe pour se battre gentiment sabre contre pied de micro.


Freddie Mercury se sent trop fort pour porter un imper comme ses copains.


  Au final c'est un album très bref que nous livre Queen avec A Kind of Magic. S'il possède quelques moments de bravoure, ils sont malheureusement un peu noyés dans un trop grand nombre de morceaux peu originaux ou simplement pénibles. L'exercice de style est pourtant cette fois réussi puisqu'il est inutile de simplement connaître le film dont sont tirées les chanson pour apprécier l'album tel qu'il est. Les thèmes du film sont portés à une dimension plus générale et chacun pourra donc y trouver son compte. Beaucoup considèrent l'album en tant que B.O comme l'une des meilleures jamais publiées, c'est sans doute légèrement exagéré mais il faut reconnaître la qualité de morceaux comme A Kind of Magic, Princes of the Universe ou même Who Wants to Live Forever. Le regret principal que nous pouvons avoir est que le groupe ne se soit pas appliqué à ce point sur chacun des morceaux ce qui rend l'album bien trop inégal pour être une vraie réussite. Le succès sera pourtant bel et bien au rendez-vous, l'album restera classé 63 semaines dans les charts anglais et sera à la première place dés sa sortie ce qui aura de quoi redorer pour de bon le blason du groupe. Les critiques ne sont pas si élogieuses mais le groupe a appris depuis longtemps à ne pas les considérer très sérieusement.
  L'album donnera par ailleurs lieu à une gigantesque tournée, la plus importante sur tous les plans pour le groupe qui remplira stade sur stade. Le double album Live at Wembley en est le témoignage le plus probant, mettant en valeur les grandes qualités de showman d'un Freddie Mercury jouant pourtant sa dernière carte face aux foules de fans. La maladie du chanteur est alors déclarée (mais pas officiellement) et dés lors le groupe se concentrera sur ses efforts en studio, délaissant à regret la scène qui les voit pourtant donner le meilleur de leur talent.
  

20120429

Master Marathon Queen-The Works 1984




    Il a fallu à Queen deux ans pour se remettre de l'album précédent, Hot Space. Les tensions qui venaient d'apparaître on dû s'appaiser, les projets solos se matérialiser pour qu'enfin le groupe réalise qu'il est plus fort uni que dispersé. La page disco/funk/dance est tournée et Queen revient à une approche plus conventionnelle et plus proche de son ancien ton, une approche plus rock néanmoins largement plus teintée de pop qu'à ses débuts. The Works indique que Queen s'est effectivement remis au travail afin de fournir un album qui contentera bien plus ses fans et qui avec un peu de chance élargira même leur base en conquérant les ondes.
                 The Works.





    1984 est une année particulière, mais pas forcément dans le bon sens. C'est l'avènement du clip vidéo, MTV est en train de devenir une institution, Ghostbusters cartonne au cinéma, les épaulettes et les cheveux peroxydés sont à la mode...Tous les clichés des années 80 se trouvent cristallisés à merveille dans cette année, pour le meilleur et pour le pire. Beaucoup d'artistes comme David Bowie, qui publie cette année là Never Let Me Down, sans conteste son plus mauvais album, sont au creux de la vague. C'est par ailleurs l'année du triomphe de Prince avec son titre/album/film Purple Rain.
   En cette année Orwellienne, Freddie Mercury participe à une ressortie du film Metropolis de Fritz Lang, remaniée par Georgio Moroder qui, jugeant peut-être l'oeuvre poussièreuse (ah les années 20 quelle bande de nuls, ils n'avaient même pas de Macintosh ces rustres ! Nous en 1984 au moins...) décide d'agrémenter sa version de compositions d'artistes de l'époque dont Adam Ant, Bonnie Tyler, Pat Benatar et notre moustachu. Certains n'ont pas vraiment la notion d'oeuvre historique, néanmoins cela permet à Freddie Mercury de négocier l'utilisation d'images du film (dont il est fan) pour un futur clip du groupe.

   Et c'est pour supporter la sortie de Radio Gaga que seront utilisés quelques plans du film original à travers les vues de la ville futuriste dépeinte par Fritz Lang. La chanson en elle même est un morceau de Roger Taylor, jugeant Radio Caca trop idiot et trop peu universel, il déplore ici la perte de vitesse de la radio face à la vidéo de plus en plus envahissante. Les chansons ne sont plus alors découvertes par le seul passage radio, elles ont désormais besoin d'un support visuel accrocheur pour faire vendre des disques, ce ne sont plus vraiment les qualités musicales d'un groupe qui sont jugée, mais plutôt, selon lui leur image à travers des clips les plus attrayants possibles. L'intention est louable et le message est plutôt pertinent. Mais alors pourquoi en faire une chanson si marquée par le synthétisme ? Radio Gaga rassemble apparemment tout ce que le groupe comptait comme synthétiseurs, effets spéciaux (enfin pas tous nous verrons un peu plus tard) et boîtes à rythmes. Nous avons à travers le titre une vision assez claire de ce que pourrait être la musique de futur...de 1984. Le refrain entêtant est aussi pénible qu'efficace. Alors que le thème aurait pu donner un témoignage émouvant d'un homme regrettant le bon vieux temps de la radio où l'on découvrit ébahi de nouveaux sons venus de nulle part, et bien nous avons droit à un des morceaux les plus marqués dans les années 80 du groupe et sans doute un des plus fatigants à l'écoute. Il sera cependant un succès incontesté du groupe, ravivant la flamme auprès des fans et de tous ceux qui avaient jugé leurs précédents efforts trop éloignés de leurs morceaux habituels, ce qui est finalement assez étrange et paradoxal.
    Tear it Up  rattrape le coup. Brian May reprend les armes en nous livrant un morceau nettement plus rock, comme le groupe avait semble-t-il oublié d'en faire depuis un moment. La batterie rappelle évidemment We Will Rock You et le riff agressif ne manquera pas de faire se remuer les foules lors des concerts. C'est un morceau mené tambour battant, au sens propre qui montre que le groupe est tout à fait capable de revenir à sa pugnacité d'autrefois, rappelant par son mordant le morceau Tear Your Mother Down du même Brian May par exemple.
   It's a Hardlife est la première chanson de Freddie Mercury à apparaître sur cet album. C'est une chanson douce amère sur la difficulté des relations amoureuses tout à fait comme Play the Game sur l'album... The Game  ou Jealousy sur Jazz rappelant les morceaux des premières années du groupe, où on trouvait un Freddie Mercury ambigu, à la voix haut perchée mais maîtrisée accompagnée par un piano ou par une guitare compatissante de Brian May. La chanson prend de l'ampleur au fur et à mesure jusqu'à prendre des dimensions à nouveau baroques lors du solo de Brian May qui ne manquera pas de nous rappeler Bohemian Rhapsody. Marquée à la fois par un thème intimiste et une ambiance grandiloquente, cette chanson évoque en tous points les meilleurs moments du groupe, ou du moins ses plus emblématiques. It's a Hardlife semble étrangement perdue au milieu de cette pop taillée pour les radios de l'époque à l'instar de la vidéo qui l'accompagne. Il s'agit d'un clip étrange, kitsch à un point qu'on pensait hors d'atteinte et qui finalement résume tout à fait le style du groupe même si Freddie Mercury semble être à nouveau le seul dans son élément à en croire les commentaires que feront les autres membres. Il y est dépeint une cour bariolée de créatures baroques et extravagantes incluant Freddie Mercury vêtu du costume surnommé "giant prawn" (oui la crevette géante) par le groupe.
   
   La chanson évolue depuis une certaine mélancolie vers une porté plus proche d'un hymne. Il y a en elle une sorte de bilan plus général que celui d'une simple relation amoureuse, on peut la voir comme un bon résumé du parcours de Queen ou de Freddie Mercury, assumant ses erreurs éventuelles mais affirmant tout de même ses succès.  Bien qu'ancrée dans les atmosphères passées de Queen, la chanson trouvera un écho plus tard dans des albums comme Innuendo et même Made in Heaven dont elle partage certaines des atmosphères. A noter, l'introduction "I don't want my freedom..." est chantée sur l'air d'opéra (ah ouais !) Vesti la Giubba  de Ruggiero Leoncavallo dans Pagliacci.


   Man On the Prowl est une nouvelle incursion de Freddie Mercury dans la sphère rockabilly, comme il l'avait fait avec un surprenant succès avec Crazy Little Thing Called Love sur The Game. Malgré tout cela ne prend plus vraiment. La chanson est trop répétitive et ses percussions ont trop la teinte générale de l'album, froide et mécanique, pour coller réellement à l'exercice de style. On sent néanmoins un certain enthousiasme dans la voix de Freddie Mercury, rendant un nouvel hommage à son idole Elvis.
   Machines (or '"Back to Humans") est une collaboration signée Brian May et Roger Taylor, pour le meilleur et un peu aussi pour le pire. Très proche de Radio Gaga par son thème et sa forme, Machines est encore plus marquée par...euh...les machines. Sa pulsation régulière en forme de bruit de pistolet laser n'aurait pas dépareillé dans Flash Gordon malgré une présence plus marquée quand même des guitares. Le chant de Freddie Mercury rappelle également celui qu'il avait sur Flash's Theme mais il est cette fois adjoint de celui de Roger Taylor qui a trouvé un nouveau jouet ! Un super vocoder lui donne une voix de robot qui lui permet de répéter le mot "machines" à de très nombreuses reprises ainsi que d'entonner un couplet entier avec cet effet. Les paroles quant à elles expriment une inquiétude face à la domination des machines (prononcer avec une voix de robot) proche du Domo Arrigato Mr Roboto de Styx paru un an plus tôt. Elles incluent plusieurs termes provenant des balbutiement de l'informatique comme "software", "hardware" ou "Random Access Memory". Tout cela est certes très cohérent mais la chanson est au mieux très drôle, au pire très pénible à écouter.
   I Want to Break Free est un autre des morceaux emblématiques de Queen et c'est John Deacon qui en est l'auteur, ce qui après le succès de Another One Bites the Dust prouve son efficacité ! La chanson est très célèbre et encore aujourd'hui il est difficile de ne pas tomber dessus en écoutant la radio régulièrement. Il s'agit d'une sorte de ballade pop assez sucrée, presque simpliste et à la limite de la comptine. Cela ne la rend que plus efficace et il est très difficile de s'en débarrasser lorsqu'elle vous rentre dans la tête. Freddie Mercury cabotine tant qu'il peut et semble réellement s'amuser sur ce morceau. L'atmosphère robotique de l'album y est perceptible mais elle reste en retrait et sert le morceau au lieu de le vampiriser. Le succès sera au rendez-vous en grande partie grâce à un clip mémorable qui comporte, parlons-en, une parodie de la sitcom anglaise Coronation Street, permet aux membres du groupe de se travestir en quatre femmes d'âges différents. John Deacon y est une grand-mère renfrognée, Brian May une femme parée de bigoudis et vêtue d'une robe de chambre, Roger Taylor y apparaît en une écolière étrangement convaincante par ses mimiques (et ressemblant étrangement à Emma Bunton des Spice Girls aussi) tandis que Freddy Mercury, qui a l'air très content d'être là, passe l'aspirateur en tenue sexy, mini-jupe, bas et faux seins, toute moustache dehors. Pour en revenir à la musique, Brian May se taille une part de choix dans le morceau en plaçant un solo de guitare déguisé en trompette. La chanson, qui parle de relations amoureuses mais peut être envisagée sous un jour plus général, sera utilisée à plusieurs reprises à diverses occasions servant d'hymnes à de nombreuses organisations allant des associations gays et lesbiennes à l'ANC de Nelson Mandela.




   Keep Passing the Open Windows est une chanson que Freddy Mercury avait écrite pour le film Hotel New Hampshire en 1983, elle a subi quelques modifications pour mieux s'intégrer à l'album. Majoritairement dominée par le piano et les synthétiseurs, la chanson rappelle curieusement la chanson The Hero qui concluait Flash Gordon et certains effets font également penser au Prime Jive de Roger Taylor sur The Game. Le thème est un peu naïf, encourageant à la confiance en soi et en l'amour mais cela ne rend pas la chanson totalement désagréable, lui donnant une certaine fraîcheur un peu absente des albums de Queen depuis quelques temps.
   Hammer to Fall  est en opposition totale avec le morceau précédent. Il est signé par Brian May, est orienté rock à l'instar de Tear it Up et bénéficie d'un riff teigneux et efficace. Après l'inquiétude de la montée en puissance des machines, c'est la guerre froide et l'ombre du nucléaire ("the Mushroom Cloud") qui est évoquée. Les percussions de Roger Taylor y sont une fois de plus assez mécaniques mais cette fois, cela se prête admirablement au morceau, renforçant son aspect incisif et énervé. Malgré tout, le chant admirable de Freddie Mercury, accompagné par le choeur comme à la "bonne vieille époque" donne à la chanson une teinte universelle et fédératrice, l'expédiant immédiatement au rang des meilleurs hymnes du groupe et faisant de Hammer to Fall un incontournable en live où elle sera interprétée avec encore plus d'énergie. Les fans sont rassurés, Queen est encore capable d'offrir d'excellents morceaux rocks, il était plus que temps de le rappeler. Ce genre de titre ramène le groupe sur le devant de la scène après plusieurs essais décevants.
   Is This the World We Created...? conclut l'album d'une façon inatendue. Après le très rock Hammer to Fall et un album globalement marqué par des productions très travaillées et pleines de gimmicks synthétiques, c'est une chanson simple,  oeuvre de Freddie Mercury et Brian May, portée par la voix de Mercury et une guitare acoustique, c'est tout. Il y a dans cette chanson une atmosphère intime très proche de Love of My Life (à laquelle elle est par ailleurs couplée lors du Live at Wembley de 1986 par exemple). L'atmosphère froide, propre aux années 80 qui baigne tout l'album cède ici place à une chaleur humaine bienvenue. Alors, certes, les paroles ne sont pas vraiment très subtiles et suintent un peu de naïveté, néanmoins, le timbre chaleureux et plus grâve qu'à accoutumée de Freddie Mercury adjointe à la guitare subtile de Brian May nous offrent un morceau touchant qui nous remémore donc les morceaux intimistes des débuts. C'est donc une conclusion en total opposition à Radio Gaga qui récompense chacun de ceux qui auront écouté l'album en entier (même s'il n'est pas très long).


    Clairement, The Works est très marqué par la volonté de Queen de tout mettre sérieusement en oeuvre pour non seulement reconquérir son public, mais aussi gagner une dimension plus universelle. Le rock est donc de retour, dans une forme efficace et abordable, et la pop y est absolument décomplexée. Les titres de l'album seront par ailleurs presque tous édités en singles (les autres seront des faces B) et sont tous taillés pour les radios. Les clips sont également objet de plus d'attention ainsi que l'image du groupe qui à cette époque acquiert la dimension iconique reconnue par le grand public. Freddie et sa moustache, Roger Taylor blond et ébouriffé, John Deacon frisé et coloré (et en short aussi) pendant que Brian May conserve sa tignasse coûte que coûte. Ce sont des détails qui créent pourtant une image bien plus commerciale qu'auparavant : sur ce point c'est une totale réussite.
   Musicalement il faut reconnaître que Queen s'en sort plutôt bien. L'album est porté par quelques excellents morceaux dont It's a Hard Life, Tear it Up, I Want to Break Free, Hammer to Fall ou même Is This the World We Created ce qui quand on y regarde bien fait un peu plus de la moitié des titres. Les réussites de The Work sont néanmoins les titres les plus proches des bases du groupe ce qui révèle leur volonté de produire un album de qualité. Les autres morceaux, au mieux oubliables, au pire atroces plombent un peu l'ambiance d'un album qui aurait pu être un sans faute. Ceci laisse donc un constat mitigé, puisque l'album laisse une étrange impression de froideur due en grande partie à sa production très marquée années 80. De tout ce que nous offre l'année 1984 The Work s'en sort en tout cas plutôt bien lorsqu'il sait éviter les écueils énorme de cette période. C'est celui qui sur de nombreux points représente le mieux ce qu'est Queen pour le grand public, ce en quoi il peut décevoir les amateurs de la première heure (mais beaucoup seront rassurés après la déception Hot Space). Il obtiendra de bonnes critiques à sa sortie et est reconnu encore de nos jours comme un classique de l'époque.

20120425

Master Marathon Queen-Hot Space 1982

     
    L'expérience Flash Gordon achevée, c'est avec une certaine impatience que nous pouvons attendre le retour de Queen aux commandes d'un véritable album et non plus d'une bande son bricolée pour un film au succès mitigé. Au sein du groupe, des tensions sont apparues, les intérêts musicaux de ses membres divergent de plus en plus et c'est le moment également du développement de projets solo sur lesquels nous ne nous étendrons pas pour l'instant. Les concerts par contre sont par contre toujours plus gigantesques, le groupe s'aventurant même en Amérique du Sud, chose peu courante à cette époque. Le succès populaire est là depuis l'album The Game et la notoriété de Queen est désormais mondiale en dépit de critiques plus mitigées. L'album Hot Space apparaît dans ce contexte, le groupe semble donc reprendre le cours normal de son existence et nous pouvons nous attabler tranquillement autour de cette nouvelle production, le coeur rassuré de nous retrouver en terrain connu.



                                                                       Hot Space.


    Le coeur rassuré, pas vraiment en fait.
    Sous une pochette aux couleurs tranchées inspirée apparemment par le jeu de jeu de Simon (avec une inversion que les plus observateurs remarqueront), se cache un album vraiment étrange dans la discographie du groupe. Il semble que le groupe se soit lancé à corps perdu à travers tout un album dans une exploitation du succès total de Another One Bites the Dust. Queen abandonne son style hard-rock/pop-rock pour aborder un style qui a priori ne lui sied pas, Hot Space est une sorte de mélange disco-funk/new-wave/pop synthétique, et oui, synthétique. Oubliés les solos de Brian May au style baroque, oubliés les roulements de tambour de Roger Taylor et bienvenue aux synthétiseurs les plus débridés accompagné de leur lot de boîtes à rythmes encore peu développées à l'époque et donc très stéréotypées. Le constat est rapide, cet album n'a rien  à voir avec le reste de la carrière du groupe et la déception des fans de la première heure comme la volée de bois vert en provenance de la critique seront au rendez-vous. Généralement, et si l'on exclut Flash Gordon de la discographie canonique de Queen, Hot Space et considéré comme le pire album du groupe, tout simplement. Tout cela est-il justifié ou avons-nous là une oeuvre incomprise ? Penchons-nous sur les morceaux afin de peut-être trouver une réponse.




   Staying Power ouvre le bal avec son cortège de synthétiseurs outranciers et ses cuivres étrangement artificiels. Le rythme marqué et dansant est caractéristique de l'album dont il constitue une introduction tout à fait représentative. Ce morceau suffit presque à faire crier "TRAHISON" à l'auditeur qui ne pourra s'empêcher d'être déstabilisé par cette composition dont seul le nom sur la pochette nous rappelle qu'elle est bien de Queen. Mais sinon, est-ce si atroce ? Et bien, le morceau porte beaucoup des stigmates de son époque, les cuivres formatés et la boîte à rythme ont une artificialité difficile à surmonter. Cependant, un certain charme opère, il nous replonge dans cette époque de tâtonnement musical où l'usage des machines est encore un peu marginal et mal maîtrisé. Mieux encore, la motivation de Freddie Mercury qui cabotine avec bonheur rend cet étrange morceau plutôt efficace.
  Dancer est un morceau de Brian May, plutôt discret dans un album qui met surtout en avant le groove ainsi qu'une thématique (homo)sexuelle qui ne l'inspire que moyennement. Le morceau est pourtant tout à fait en accord avec le reste de l'album, synthétique, presque automatisé dans sa rythmique, et avant tout dansant (oui, c'est logique). Sa trame presque robotique contraste avec l'attitude très organique de Freddie Mercury qui s'en donne à coeur joie, baignant dans un univers où il semble tout à fait se (com)plaire. Alors oui, cela n'a pas grand chose à voir avec Queen et nous avons là un morceau qui fait bien plus penser aux projets solo du chanteur, néanmoins l'apport du groupe rend la chanson nettement plus efficace. Les paroles décrivent avec enthousiasme les soirées de débauche organisées à l'époque par le groupe où on aurait même vu des nains couverts de viande... (Lady Gaga n'a jamais caché son admiration pour le groupe)
   Back Chat est un morceau de John Deacon. Il joue de tous les instruments sur ce morceau à part la batterie très "poum-poum-tchak" de Roger Taylor (et son solo encore plus "poum-poum-poum"). La basse est tout à fait funky et particulièrement accrocheuse, la guitare rythmique est également incisive et nerveuse, tout autant que les petits solos répartis tout au long du morceau. Après Another One Bites the Dust, on se doutait bien des capacités du discret bassiste, il confirme ici même si le morceau n'a pas connu un succès comparable. Freddie Mercury n'a perdu en rien de sa motivation, il se montre à nouveau tout à fait dans son élément au sein d'une musique prêtant nettement plus à la danse que tout ce que le groupe avait produit jusqu'alors. L'album a beau être mal aimé, un morceau comme celui ci est parfaitement maîtrisé, si c'est un exercice de style, alors c'est tout à fait réussi. Back Chat n'a jamais été un classique du groupe, le morceau mérite d'être redécouvert.
   Body Language quant à lui n'a pas cette chance. Le morceau est de Freddie Mercury, et cette fois l'évocation sexuelle n'est plus du tout suggérée mais bombardée à tout va. Dégoulinant de sueur, la chanson évoque donc, à mots découverts le langage du corps. La basse synthétique qui le domine (avec une absence presque totale de guitare, Brian May ne devait pas se sentir très concerné, et on le comprend) évoque des mouvements de bassin qu'on n'imagine pas simplement dédiés à la danse et si un doute subsistait les paroles ne dissimulent aucunement les intentions du chanteur. Il décrit avec bonheur "the cutest ass" par ci, les "red lips" par là. Et hurle carrément un "give me your body" impatient. Alors oui, le morceau est très drôle, peut-être volontairement, mais il peut également être assez pénible à entendre, à la limite du dérangeant, un peu comme si on avait surpris le chanteur en pleine action. L'envie qui nous vient à l'écoute de ce morceau n'est pas vraiment celle qu'il semble vouloir provoquer en nous, nous aurions plutôt dans l'idée de refermer la porte et le laisser terminer...euh...ce qu'il est en train de faire.
   Action This Day n'est pas la suite directe. C'est un morceau de Roger Taylor comme nous avons l'habitude d'en entendre depuis le début de notre marathon : rythmé, répétitif et bancal également. La chanson tire un peu plus vers le rock que les précédentes, ce qui pourrait être une bonne nouvelle. En fait pas vraiment, même s'il a un côté entraînant, le morceau comporte plusieurs des défauts caractéristiques de ceux du batteur. L'humour n'est pas en reste sur tout cet album, malheureusement il cède place ici à une certaine naïveté dans les paroles. Si Roger Taylor n'est pas très à l'aise avec l'aspect synthétique de l'album (bien qu'il n'ait pas été le dernier à se jeter sur les synthés au buffet électronique de Flash Gordon) c'est au détour de ce morceau que nous nous en apercevons le mieux. A noter un horrible solo de (faux) saxophone typique de cette époque de trouble et de chaos que nous appelons avec révérence, les années 80.
   Put Out the Fire est le seul vrai morceau rock de l'album et il est très réussi. Tranchant avec les autres morceaux, la chanson exprime avec humour le point de vue d'un meurtrier accro aux armes à feu pour mieux en critiquer l'usage. Brian May aurait dit-on joué le solo alors qu'il était totalement bourré et honnêtement, cela n'est absolument pas un handicap. Il sort un peu de ses gonds trop raffinés pour livrer un morceau plus direct et particulièrement efficace. La batterie n'est pas en reste, très acérée, elle préfigure un peu ce qu'elle sera dans l'album à venir, The Works. Freddie Mercury quant à lui cabotine avec joie, toujours très en forme sur cet album où il ne cache décidément pas son plaisir. Il est d'un goût étrange ceci dit de voir que cette chanson s'enchaîne avec la suivante :
   Life is Real (Song for Lennon) est un hommage vibrant, quoique amer à John Lennon (ah oui ?) qui vient alors de mourir assassiné devant son luxueux appartement à New-York. La mort du chanteur signifie la fin d'un rêve pour toute une génération dont Freddie Mercury fait partie.  Plus qu'un éloge extatique, Freddie Mercury profite de l'occasion pour exprimer son sentiment d'injustice face à l'existence, dans un sens plus large que la mort de l'ancien Beatle. Il est assez rare d'entendre un point de vue si pessimiste dans une chanson du groupe, les paroles sont empreintes d'une rare et sincère amertume exprimant le sentiment d'injustice face à a mort d'un tel personnage. Freddie Mercury semble par ailleurs mêler son propre ressenti, évocant sa propre philosophie quant à sa façon de mener sa vie artistique et personnelle. Au milieu de tout cet artifice synthétique la mélodie au piano simple et calquée sur les morceaux de John Lennon (Mother ou Love particulièrement (Mother Love hein ?) est une sorte de parenthèse avant la reprise des hostilités, parenthèse étrange dans cet album tourné vers la danse.
  Calling All Girls reprend un peu les choses là où nous les avions laissées. C'est un autre morceau de Roger Taylor, et le premier qu'il publie en tant que single. Un single qui ne remportera pas un succès retentissant à vrai dire. Le morceau est pourtant plutôt entrainant et léger (et naïf oui) avec inclusion de scratch avant l'heure. Son clip mérite le détour tant il est kitsch et apparemment fauché, hommage à THX1138 de Georges Lucas. Le morceau est donc plutôt amusant et plus réussi que le lourdingue Action This Day. Il est bien-sûr teinté de nombreuses sonorités artificielles, mais avec moins d'appui que les morceaux du début de l'album.
   Las Palabras de Amor (the Words of Love) est la deuxième chanson à parenthèses de l'album, c'est important de le noter. Il s'agit d'une chanson destinée aux fans du groupe en Amérique du Sud, où Queen connait un succès remarquable. Le morceau est empreint de douceur, contrastant avec l'atmosphère dansante de l'album, laissant un peu présager de sa magistrale conclusion. Si la chanson est une fois encore un peu naïve, elle n'en est pas moins plus sincère et intimiste que les précédentes et ses paroles en espagnol, hommage aux fans d'Amérique du Sud donc, ne font qu'accentuer cet aspect. Le synthétiseur se fait orgue ondoyant d'un effet certes daté mais plutôt réussi. Le clip renforce alors l'idée d'hommage respectueux, déclaration d'amour éhontée, les membres du groupe y apparaissent en smoking et sans artifices...sauf John Deacon qui est venu en chemisette.
   Cool Cat était une chanson prévue pour une participation de David Bowie qui demandera son retrait, insatisfait du résultat. Collaboration de Freddie Mercury et John Deacon, il s'agit d'un morceau soul langoureux porté par la voix de fausset du moustachu. Le morceau n'a encore une fois rien à voir avec la production habituelle de Queen et contribue à la réputation calamiteuse de Hot Space. La chanson est relativement brève, ce qui n'est pas vraiment dramatique. Freddie Mercury semble vouloir jouer dans la cour de Prince, avec un succès mitigé. Disons qu'il est intéressant de le voir évoluer dans une tonalité poussée dans ses retranchements les plus aigus et que la basse un rien funky de Deacon a quelque chose d'accrocheur, mais la sauce ne prend pas vraiment.
  Under Pressure marque la première collaboration d'un artiste extérieur au groupe dans un morceau. Pour la peine l'artiste extérieur est David Bowie. Queen et David Bowie ont profité d'une rencontre en studio pour enregistrer ni plus ni moins que l'un des morceaux majeurs du groupe. L'atmosphère reste proche des sonorités synthétiques de l'album mais cette fois la ferveur de la danse laisse place à une approche plus désabusée et romantique de la musique. Le ton est relativement proche du "Heroes" désespéré de David Bowie, appuyé par une ligne de basse absolument inoubliable et incontournable (surtout par Vanilla Ice http://youtu.be/rog8ou-ZepE) oeuvre magistrale, les mots sont lâchés, de John Deacon très motivé à montrer ses compétences le temps d'un album. Le groupe partage donc le morceau avec un David Bowie en écorché vif qui apporte une subtilité personnelle à cette chanson. Les coeurs et les nappes de synthétiseurs, plus subtils que sur les morceaux précédents, ajoutent une dimension épique à la chanson qui, comme "Heroes" progresse sans se retourner, inexorablement et superbement. On a souvent reproché à Hot Space d'être un album froid et sans âme, Under Pressure utilise habilement cette atmosphère glacée et apparemment impersonnelle pour mieux nous conduire à des sommets poignants peu avant la fin du morceau, et de l'album. L'artificialité est ici adoptée, embrassée et sublimée pour devenir cet hymne intemporel qu'est Under Pressure. Il aura fallu le catalyseur de David Bowie (un catalyseur assez prestigieux oui) pour que le groupe renoue ici avec ses meilleures heures. Si le groupe utilisera la chanson très souvent en concert après sa parution, David Bowie mettra de nombreuses années avant de l'intégrer à ses set-lists.



  Alors, alors. Nous avions posé la question en introduction de notre étape dans le marathon, est-ce que Hot Space est effectivement une erreur de parcours du groupe, une incursion commerciale dans un univers disco/funk qui n'est pas le sien, un ratage total et honteux prouvant un manque total d'integrité ? Ou alors avons-nous là une prise de risque effrontée de la part d'un groupe qui cherche à puiser dans de nouvelles influences ? Et bien la réponse du zombie n'est pas très difficile à deviner. Hot Space est un objet insolite dans la discographie de Queen. Il n'en est pas pour autant le signe que le groupe a vendu son âme au diable, prêt à profiter des avantages financiers procurés par l'écriture de morceaux pour boîtes de nuits. Il est curieux de noter qu'à la même époque, Alice Cooper publiera ses albums les plus étranges, eux aussi apparemment synthétiques et éloignés de son univers habituel mais pourtant très personnels, quitte à s'éloigner d'un format facilement assimilé par la base de fans conventionnelle. Alors, alors. Hot Space nous livre pourtant un indice assez flagrant dés sa couverture colorée non ? Le jeu de Simon, les aplats colorés façon Andy Warhol ... Et si sous des abords ouvertement artificiels, plastiques et même basiques, et si Queen venait de produire un pur objet pop-art ? Peut-être que l'entreprise est maladroite, elle l'est parfois manifestement au travers de certains morceau moins inspirés, mais elle constitue une réelle démarche artistique dont la prise de risque se soldera par un échec commercial retentissant. Hot Space est également une excellente vitrine pour John Deacon dont la personnalité discrète nous a fait oublier son talent indéniable à la basse et en tant que compositeur. Son empreinte marque profondément l'atmosphère de cet album qui le met sur le devant de la scène à plusieurs reprises. Alors oui, Brian May doit retenir ses solos, Roger Taylor n'est pas très motivé et Freddie Mercury semble tout droit sorti d'un club cuir-moustache (et c'est à peu près le cas), mais Hot Space mérite de s'y intéresser de beaucoup plus près que ne vous le dirons la plupart des connaisseurs du groupe. Il faudra pourtant à Queen énormément d'énergie et de travail (!) pour se remettre en selle après la déception générale qui accueillit cet album fort mal aimé, à tous les sens de l'expression.



20120303

Master Marathon Queen-Flash Gordon (original soundtrack music by Queen) 1980

 
   Il arrive un moment dans la vie d'un homme où il est temps de faire face à son destin sans flancher. Oh, il est facile de se détourner de sa voie, de se laisser persuader que le moment opportun va venir, il est tout près, mais pas encore là, il est tentant de se trouver des excuses, de proposer de multiples prétextes évasifs. Pourtant, ici, nous allons prendre notre courage à deux mains, se moquer du danger et se lancer dans l'une des tâches les plus périlleuses que l'on ait à affronter dans notre courte existence : la rédaction d'un article sur Flash Gordon de Queen.


    
   Flash Gordon, l'album paraît fin 1980, au moment de la sortie du film du même nom. Les années 80 voient la science fiction remporter un succès immense au cinéma. Elle emprunte des formes différentes, de l'aventure avec Star Wars (1977-1983), de l'anticipation noire dans Blade Runner (1982), de l'action mêlée de paradoxes temporels dans Terminator (1984), de l'humour mêlé aussi de paradoxes temporels dans Back to the Future (1985-1990), ou encore de l'horreur dans l'espace où on ne vous entendra pas crier dans Alien et ses suites (1979). Chacun de ces films apporte une nouvelle dimension au genre, apportant sa touche personnelle empruntée à un ou plusieurs autres styles. Flash Gordon, de Mike Hodges est quant à lui issu du genre space-opera, auquel le réalisateur et son équipe apporteront une dimension kitsch rarement égalée. Il faut garder à l'esprit que lorsque le film est sorti, Rencontres du Troisème Type, Star Wars ou Alien avaient déjà eu leur influence sur la façon de concevoir une oeuvre de science-fiction, Flash Gordon balaie toutes ces conceptions. Il les regarde avec mépris, les piétine, crache dessus, nie jusqu'à leur existence avant de planter fièrement son étendard jaune dans le corps meurtri de ses adversaires. Hum. Dans l'idée, le film est l'adaptation sur grand écran des aventures d'un héros de comics du même nom, datant des années 30 et ayant connu un grand succès populaire. Flash combat l'empereur Ming au travers de nombreux épisodes aux rencontres multiples et originales dans de lointaines galaxies. L'oeuvre de 1980 dépeint donc ces aventures, avec un esthétisme douteux, fait de fonds bleus mal employés, de costumes qui semblent fabriqués à partir de décorations de Noël et d'effets spéciaux vraiment spéciaux. L'acteur principal, Sam J. Jones promène sa coiffure blonde peroxydée et sa musculature mise en valeur par des tenues moulantes rouges et or dans des décors en carton pâte aux côtés d'hommes volants (avec des câbles), de princesses aguicheuses (Ornella Muti) et se bat comme un vrai quaterback. Tout ici respire le kitsch comme jamais, et un certain côté crypto-gay (pas trop crypto) comme on n'en verra plus avant le Batman et Robin de Schumacher. Bon, et Queen dans tout ça ?




   Et bien Queen a eu l'insigne honneur de se voir confier la tâche monumentale de créer la bande originale de ce film !  Le groupe vient de publier The Game au succès retentissant et il se voit donc courtisé par la production du film pour en réaliser la musique. Selon le groupe lors des interviews, ils réaliseront l'album assez rapidement, en composant la musique à mesure qu'ils regardaient le film, calquant les morceaux sur l'action en cours, soulignant les débardeurs très près du corps par leurs plages de synthétiseur dont ils useront copieusement tout au long de l'album.
   Il y a de quoi dérouter bon nombre de fans, surtout ceux de la première heure. Ici, le synthétiseur est mis en avant comme jamais, les titres chantés ne sont qu'au nombre de 3 sur 18 (et encore, le troisième est une reprise du premier en guise de conclusion) et surtout, tout cela n'a rien de commun avec un album de Queen.
  Le morceau d'ouverture, Flash's Theme, obtiendra un certain succès néanmoins, malgré ses paroles limités, il laisse libre cours à Freddie Mercury pour d'impressionnantes vocalises. Il atteint des notes aigües comme il ne le fera quasiment jamais plus et son débit est d'une rapidité et d'une précision sans faille. La pulsation rythmique implacable qui sous-tend le titre le rend mine de rien très accrocheur. Le morceau est cependant, dans sa version album, encombré de savoureux extraits de dialogues.
 A travers les différents morceaux, plutôt courts, qui composent la bande son, on sera bercés avec joie par des nappes interminables de synthétiseurs, de bruits de pistolets laser (ptiouuu !) et de bruitages du film. Le groupe s'attèle parfaitement à sa tâche de coller un maximum au film, on ne peut pas lui retirer ça. Seulement est-ce vraiment un album écoutable en soi ?
   In the Space Capsule (The Love Theme) est un peu plus subtil qu'il n'y paraît, on y ressent malgré tout l'enrobage synthétique une réelle volonté de bien faire. Brian May semble avoir réussi à imposer sa patte sur ce morceau de Roger Taylor et peut-être que dans un autre contexte il auait pu en sortir quelque chose de très beau. Le suivant, Ming's Theme (in the Court of Ming the Merciless) a quelque chose de kitsch et en même temps menaçant qui une fois encore colle tout à fait au thème imposé par le film.
  Le morceau Football Fight est assez entrainant, il se calque sur le risible combat du héros armé d'un gros oeuf de pâques qui lui sert de ballon contre les gardes à dorures de l'Empereur Ming. Si les synthétiseurs sont bien là, il y a tout de même une energie rock dans ce morceau qui garde pourtant des allures des générique télé de l'époque.


   La suite reprend les ambiances du début de l'album, poursuivant jusqu'à The Kiss (Aura Resurrects Flash) où Freddie Mercury nous flatte de ses vocalises, sans paroles, nous rappelant qu'il est encore là et qu'il reste un brillant interprête. Encore une fois il est intéressant de se demander si dans un autre contexte, le morceau n'aurait pas pu trouver une place de meilleur choix.
   Les morceaux s'enchaînent dans leur déluge d'effets spéciaux, Arboria (Planet of the Tree Men) de John Deacon se développe autour d'un thème au son flûté évoquant le mystère de la planète en question (où des hommes au sang vert et porteurs de MOUSTACHES ont une notion inflexible de l'honneur et mettent leur bras dans des grosses plantes carnivores mal faites). Flash to the Rescue reprend la pulsation du thème du héros après les ambiances menaçantes de Escape from the Swamp (par menaçant on entendra que les notes du synthétiseur y sont plus grâves).
  Arrivent enfin Vultan's Theme (Attack of the Hawk Men) et Battle Theme, aux ambitions plus épiques qui marquent certaines des scènes les plus risible du film avec une plétore de fonds bleus et de transparences mal gérées ! Rappelant un peu Football Fight par le côté énergique de ses morceaux, les deux thèmes s'enchaînent dans un feu d'artifice synthétique difficile à prendre au sérieux.
   The Wedding March reprend le morceau bien connu de Wagner à la sauce Brian May. Et cela fonctionne plutôt bien, nous rappelant les grandes heures de A Night at the Opera avec sa conclusion par un God Saves the Queen à la guitare electrique. C'est une assez bonne surprise à ce moment de l'album et une touche d'humour bienvenue ainsi que d'un retour comme une bouffée d'air pur de cet instrument plus proche des racines du groupe.
  A partir de là tout va très vite, il ne reste plus qu'à peine plus de 4 minutes avant la conclusion de l'album. Là, s'enchaînent thème du héros, bruitages d'explosions pas très convaincantes, pistolets lasers à n'en plus pouvoir (piouu, piiiouu !), montées épiques pas trop épiques non plus à travers Marriage of Dale and Ming (and Flash approaching), Crash Dive on Mingo City et Flash's Theme Reprise (Victory celebrations).
 L'album se conclut par l'autre chanson donc, The Hero, et c'est avec bonheur que nous retrouvons un peu de ce qui a fait le succès du groupe jusqu'à présent. La guitare est bel et bien là, Freddie Mercury paraît très motivé (d'en finir avec cette aventure spatiale ?) et tout cela constitue un morceau qui n'a rien de très mémorable mais qui n'en reste pas désagréable. Il constituera la face B du single Flash's Theme et sera même repris sur scène par le groupe lors des tournées avec une certaine efficacité.




  Que conclure de l'écoute de cet album de Queen qui n'en est pas vraiment un ? Peut-être ceci justement. Si l'on aborde Flash Gordon comme un album du groupe alors il n'y a pas grand chose à en garder. Deux morceaux chantés plutôt efficaces, quelques touches sympathiques éparpillées dans un magma synthétique mal maîtrisé... Cependant, si l'on regarde l'album comme un exercice de style, le premier essai d'un groupe à la composition d'une bande son, et bien le résultat n'est pas si négatif que ça. En tant que musique "fonctionnelle", devant souligner l'action d'un film (et quelle action !) alors il remplit parfaitement son contrat. Il aura fallu pas mal de courage au groupe pour composer des morceaux devant s'inclure à un tel monument du kitsch, et si le but est effectivement de rendre une version sonore de l'ambiance du film, alors c'est tout à fait réussi. Par ailleurs, certains éléments de l'album sont d'une étonnante subtilité, le chant de Mercury dans The Kiss ou la guitare de May dans In The Space Capsule n'auraient sans doute pas trouvé leur place sur des albums du groupe et leur ont permis d'exprimer des aspects plutôt rares de leur créativité. Disons que dans le meilleur des cas il aura s'agit pour le groupe de nous dévoiler certains aspects inexplorés de son univers, dans le pire, il s'agit d'une sorte de longue musique d'ambiance donnant l'impression que Queen s'est amusé à s'enregistrer pendant qu'il testait tous les effets de son nouveau synthétiseur.
  Le succès ne sera pas vraiment au rendez-vous, ni pour le film, ni pour le groupe, Queen sera déçu de cette expérience tout autant que leur fans qui exprimeront régulièrement leur rejet de cet album. L'expérience du groupe avec le cinéma ne s'arrêtera pas ici pour autant, quelques années les séparent de leur prochaine incursion dans ce monde à travers le film Highlander. Le succès attendra donc quelques années, d'autant que le groupe livrera prochainement un autre album très controversé, Hot Space.

20120212

Master Marathon Queen-The Game 1980



   Nous y sommes, 1980, Queen a marqué la deuxième moitié des années 70 par son style flamboyant et c'est tout de cuir bardé que le groupe aborde cette nouvelle décénie.


                                                                                    The Game.


  The Game est le huitième album de Queen, il marquera une nette rupture déjà un peu amorcée avec News of the World, dans l'horizon musical du groupe. D'abord, il marque le début de l'usage du synthétiseur, chose improbable aux débuts de leur aventure, l'absence de l'instrument était même clairement proclamée dans les notes des albums ! Ici il s'étale sans vergogne, dans tous ses effets plus ou moins bienvenus, nous le verrons. Ensuite, second fait d'une importance majeure et là il suffit de feuilleter le livret de la version CD pour s'en rendre compte, ce dés la première page : là, posant comme si de rien n'était, accoudé à une balustrade de balcon, Freddie Mercury arbore fièrement UNE MOUSTACHE ! La rupture est consommée, il y aura, pour ces deux raisons (dans des mesures différentes certes mais tout de même) un avant et un après The Game.


  Play the Game est l'introduction logique à cet album. Le morceau nous accueille avec une boucle suraigüe de synthétiseur s'enchaînant sur une introduction plus conventionnelle au piano. Non mais que se passe-t-il dans cet album ? L'introduction brutale du synthétiseur dans la musique de Queen a de quoi dérouter. On aurait pu y aller par petites touches pour nous acclimater, mais non, dés les premières secondes du premier morceau, c'est un déluge synthétique qui se répand sans vergogne dans nos oreilles. Peut-être que tout cela n'est qu'une subtile manoeuvre de diversion dont le but est de nous faire oublier la MOUSTACHE, toutes les théories se valent. En tout cas ça n'a guère fonctionné car, si jadis les fans de Queen lançaient des fleurs au chanteur durant les concerts, à partir de là ce seront des rasoirs qu'ils lui enverront, témoignage désespéré du rejet violent de cette nouvelle pilosité faciale explicite. Bien, qu'en est-il de la chanson ? A vrai dire il s'agit d'une ballade de Freddie Mercury, tout à fait classique finalement, qui traite de l'extrême complexité des rapports amoureux et de la part de jeu qu'ils comportent. Le synthétiseur ne fait finalement qu'ajouter une dimension un peu étrange au morceau ainsi qu'une certaine froideur, bon, il n'est pas tout à fait nécessaire avouons-le mais il a quelque chose de ludique (facile) qui colle au thème. On dirait un peu que le groupe s'est trouvé un  nouveau jouet pour être honnête.
  Dragon Attack est un morceau de Brian May dominé cependant par la basse de John Deacon qui nous fait ici une belle démonstration de son talent. Le morceau est assez dépouillé, le chant de Freddie Mercury, presque a-capella alterne avec la mélodie principale lors des couplets où la basse prend son ampleur. John Deacon nous gratifie même d'un solo de basse très réussi, un brin funky, vers la fin de la chanson. Cette chanson aurait sa place sur l'album Hot Space à venir pour son côté dansant qu'on n'avait encore jamais trop entendu chez Queen. Enfin en parlant de ça...
   Another One Bites the Dust est le morceau qui synthétise le mieux ce nouvel aspect du groupe. John Deacon signe ici, ni plus ni moins, qu'un des morceaux les plus réussis de Queen et presque tout seul. Le bassiste, discret, refusant de chanter la moindre note, recycle une ligne de basse de Chic pour la rendre autrement plus menaçante, joue de tous les instruments pour la peine, s'adjoignant les services tout de même de Brian May pour le solo riche en effets spéciaux et de Roger Taylor pour le petit solo de batterie, pour pondre ici le plus grand succès commercial du groupe ! Le morceau sera classé numéro 1 dans diverses catégories (y compris la catégorie black music aux USA (!)). Freddie Mercury n'est pas en reste pour autant, il remplit ici son rôle à merveille, menaçant, arrogant et très motivé. La basse est absolument implacable, la rythmique imparable, presque martiale mais irrésistiblement dansante. La guitare rythmique, de John Deacon donc, est funky à souhait, s'autorisant quelques fioritures au milieu de cette mécanique bien huilée (comme Freddie Mercury dans certains clips). La partie de guitare aux multiples effets de Brian May n'est pas aussi envahissante sur ce morceau que dans Get Down Make Love par exemple et apporte une dimension étrange mais bienvenue à la chanson par ailleurs très carrée et qui ne comporte curieusement pas de synthétiseur. La structure de ce morceau est un modèle du genre, rien n'est en trop et rien ne pourrait être retiré sans rendre l'édifice bancal. Quelque part John Deacon offre ici à Queen son morceau le plus formellement abouti, et sans doute le plus efficace. S'il emprunte bel et bien au groupe funk Chic, sa rythmique sera par la suite revampée avec respect par The Clash dans le morceau Radio Clash. La légende dit que c'est Michael Jackson qui aurait par ailleurs conseillé au groupe d'utiliser la chanson comme single. Le choix est judicieux, il faut le reconnaître, et il est assez impressionnant de se dire que c'est bel et bien le même groupe qui a publié quelques années plus tôt Bohemian Rhapsody avec lequel il ne semble avoir aucun lien de parenté. Ces deux morceaux sont pourtant le meilleur moyen de se représenter l'éclectisme du groupe ainsi que sa faculté à produire des morceaux universels dans deux styles apparemment radicalement opposés. Another One Bites the Dust est un jalon aussi important que la Rhapsody dans l'univers du groupe, une réussite tout aussi significative et un morceau incontournable dans l'histoire du rock, ni plus ni moins. John Deacon aurait pu nous prévenir avant de nous lâcher face à cette création. (A noter également que lorsque le refrain de la chanson est joué à l'envers sur une platine, aucun message caché n'apparaît, ce serait idiot et personne n'a attendu la publication de ce single pour fumer de la marijuana.)



   Need Your Loving Tonight est un autre morceau de John Deacon. Cette fois encore ce sera un single, cependant il n'aura pas un succès à l'ampleur comparable au morceau précédent. Il s'agit d'un morceau pop rock plutôt classique, agrémenté de guitares bien senties. Le ton est assez enjoué et c'est sans doute la chanson la plus légère de l'album.
   Crazy Little Thing Called Love arrive alors comme une excellente surprise. C'est une chanson que Freddie Mercury aurait écrite dans son bain. Prendre un bain semble donc être un excellent moyen de renouveler sa créativité puisque de tous les genres effleurés par Queen, le rockabilly a étrangement été ignoré. Le mal est réparé avec cette chanson qui n'est rien de moins qu'un rock'n'roll tout à fait classique, executé avec un plaisir non dissimulé par le groupe. Le morceau est donc l'oeuvre du chanteur qui signe aussi les parties de guitare rythmique accoustique ce qui est une grande première. Lors des concerts ils ironisera souvent sur le fait qu'il soit un piètre guitariste avant d'attaquer les premiers accords du morceau. Freddie Mercury signe ici un hommage à Elvis, une de ses idoles, tout en offrant au groupe un succès retentissant tout autant qu'inatendu avec cette chanson bien loin des influences habituelles du groupe. Les choeurs, ici de nouveau présents, prennent une forme étrangement désincarnée et presque fantômatique.
   Rock It (prime jive) semble de par son titre emboîter le pas de la chanson précédente (rien à voir avec le morceau de Herbie Hancok pourtant pas avare en synthé ), et effectivement ses premières notes avec une guitare retro le laissent penser. Pourtant, le morceau de Roger Taylor n'a rien du rock'n'roll des origines qu'il prétend être. Alors que Freddie Mercury entonne l'intro, c'est le batteur qui se charge du reste dans un morceau assez lourdingue, aggrémenté de synthétiseur très très années 80. Alors certes, le message est qu'on peut injecter du bon vieux rock'n'roll dans un morceau moderne, mais le résultat n'est pas vraiment un bon exemple pour soutenir cet argument. Les éléments synthétiques sont on ne peut plus kitsch et difficiles à prendre au sérieux aujourd'hui tout comme le chant de Roger Taylor qui n'est pas ici des plus inspirés. Le tout ne manque pas d'énergie ni de conviction, juste que cela tombe un peu à côté.
  Don't Try Suicide nous ramène à des sonorités plus traditionnelles, presque jazzy avec une basse proéminente et des claquements de mains marqués qui font un peu penser à une tentative d'intimidation tirée de West Side Story. La chanson de Freddie Mercury est une invective bourrée d'humour noir dans le but d'empêcher un geste inconsidéré de son interlocuteur. Les arguments exposés ne sont pas ceux qu'on emploierait devant une telle situation ce qui procure un charme décalé à la chanson qui, si elle ne restera pas comme une des compositions majeures du groupe, reste un excellent morceau.
  Sail Away Sweet Sister est un morceau assez typique de Brian May lorsqu'il est en mode sentimental. Il s'adresse dans cette ballade à la soeur qu'il n'a jamais eu (comme mentionné dans les notes du livret). C'est un morceau assez mélancolique, façon amour eternel mais incompris, soutenu par le piano de Mercury et une guitare accoustique raffinée et virtuose. La chanson s'adresse à une soeur fugueuse, à qui Brian May assure son amour inconditionnel. A moins que. A moins qu'il n'y ait un autre sens. Si on prend pour acquis le fait que le guitariste n'ait pas de soeur peut-on se demander si la chanson ne s'adresserait pas à quelqu'un d'autre ? Les paroles évoquent des choix difficiles et irrémediables mais acceptés sans conditions par le guitariste. Et si la chanson ne s'adressait pas à une fille du tout ? Et si en fait elle enjoignait juste quelqu'un d'autre à braver les forces hostiles et assumer sa nouvelle vie ? Est-il tout à fait idiot de penser que le guitariste parlerait ici du coming-out de son chanteur ? Freddie Mercury vient tout juste de se laisser pousser la moustache  (nous l'avons vu il me semble) et c'est à cette période qu'il se met à fréquenter les milieux gays avec asssiduité. Est-ce que Brian May n'évoquerait pas à mots voilés cette situation, déclarant son total soutien à Freddie Mercury ? Ce n'est pas tout à fait impossible. Relire les paroles dans cette optique est assez troublant.
   Coming Soon est une nouvelle chanson de Roger Taylor, décidément assez envahissant. Le morceau est assez proche de Rock It de par son synthétiseur omniprésent, de sa rythmique lourde, et de son côté tout à fait kitsch. Le chant est assuré par Freddy Mercury ce qui sauve un peu la donne ce coup ci.
   Save Me renoue un peu avec la tradition du groupe. Il s'agit d'une ballade de Brian May, au ton désespéré mais qui se change peu  à peu en un morceau plus ample, à dimension d'un hymne. Freddie Mercury chante les paroles d'une façon très inspirée qui nous rappelle ses facilités indéniables. Le morceau est plutôt classique pour Queen et il obtiendra un succès notable. Il sera également un morceau de choix lors des concerts du groupe de par sa dimension universelle, ceci malgré un thème pourtant assez tragique.

  Alors ? Est-ce qu'il fallait en faire tout un plat ? Oui il y a bien des synthétiseurs dans The Game et pas des plus discrets, et oui il y a aussi de la moustache. En fait, plus que l'introduction du synthétiseur, The Game est marqué par l'entrée du groupe dans une nouvelle phase. Queen abandonne ici peu à peu le hard-rock pour prendre une direction nettement plus pop. La base de fans du début se sentira trahie, l'album n'a plus rien à voir avec les envolées lyriques d'antan. The Game est cependant l'album le mieux vendu du groupe aux Etats-Unis et c'est par lui que Queen prendra la dimension mondiale qu'on lui connait et c'est par lui qu'il acquierera une toute nouvelle base de fans. Le résultat est mitigé, certains morceaux sont de pures réussites, Another One Bites the Dust en est la plus belle illustration, tandis que d'autres ont peine à émerger surtout selon les standards habituels du groupe. Il était évident que pour obtenir cette nouvelle dimension populaire, le groupe aurait à faire certaines concessions, certains ne les pardonneront pas (moustache y comprise), mais il aura également pris quelques risques, avec succès, les résultats le prouvent. The Game est donc une réussite pour le groupe, il obtiendra d'ailleurs un accueil assez chaleureux à sa sortie, ses morceaux de bravoure font en effet largement oublier ses maladresses inévitables de toutes façons lorsqu'un groupe décide aussi nettement d'effectuer un virage dans son orientation musicale.

Master Marathon Queen-Jazz 1978




      Depuis son premier album, Queen a évolué, le style du groupe s'est peu à peu affirmé jusqu'à exploser au grand jour dans un déluge baroque puis s'est canalisé au tournant de 1977, s'adaptant à de nouveaux codes pour gagner en accessibilité, ce avec plus ou moins de bonheur. Le titre de l'album qui paraît ce mois d'octobre 1978 est trompeur, en effet, Jazz est l'un des albums les plus rock du groupe.

                                                                                    Jazz.

   Jazz est un album de transition pour le groupe, il sera la dernière vraie oeuvre flamboyante et chamarée du groupe avant longtemps. Il est également à mi chemin entre les deux succès commerciaux que sont News of the World et The Game, ne comporte pas non plus de morceaux aussi emblématiques que ses prédécesseurs et successeurs et sa pochette est plus minimaliste que jamais. Pourtant, tous ces aspects ne font pas de Jazz un album mineur, bien au contraire.

  Mustapha sert d'introduction à l'album, il s'agit d'un rock aux tonalités venues d'un Orient de pacotille. Peut-être est-ce là un rappel humoristique des origines parsis de Freddie Mercury, toujours est-il qu'il est inutile de chercher à traduire les paroles qui sont pour la plupart faites d'un amalgame d'arabe approximatif et de simple yahourt. Le morceau n'en est pas moins entrainant et efficace, marque par des guitares incisives de Brian May en grande forme sur tout l'album.
   Fat Bottomed Girls vient nous le prouver, la chanson pleine d'humour de Brian May est une évocation inatendue de son amour pour les grosses fesses, ni plus ni moins. Le morceau en soi est un heavy-blues à la rythmique très appuyée par un Roger Taylor qui, lui aussi, semble très en forme sur cet album. Original dans le fond comme dans la forme, le morceau à l'ambiance exagérément macho est très attachant et Freddie Mercury s'en donne à coeur joie dans la narration de cette histoire d'amour universel pour les fesses volumineuses et leur propriétaires.
   Jealousy vient calmer les ardeurs avec son ton nettement plus intimiste. Il s'agit d'une ballade douce amère de Freddy Mercury accompagné par Brian May qui a bricolé pour l'occasion sa guitare red-special à l'aide de cordes à piano afin de lui donner un son proche du sitar. Cette chanson rappelle les premières heures du groupe par son maniérisme délicat.
  Bicycle Race nous ramène cependant à des considérations plus terre à terre. La chanson à la forme d'un dialogue où Freddie Mercury répond au choeur avec un phrasé plus parlé que chanté. C'est un morceau assez étrange dans sa structure plutôt originale dans le paysage musical du groupe. Il est amusant d'y remarquer de nombreuses références culturelles de l'époque comme "Jaws" ou le récent "Star Wars". Faisant preuve d'un engagement rare, Freddie Mercury oppose à toutes les stimulations évoquées dans la chanson son unique passion pour le cyclisme ! Attention, il y a peut-être une allusion sexuelle là-dessous, d'autant que les Fat Bottomed Girls y réapparaissent comme par magie, y compris dans le clip vidéo qui sera tourné pour promouvoir ce single au grand desarroi des loueurs de vélos qui exigeront un dédommagement pour remplacer toutes les selles. (Ah ai-je oublié de mentionner que le clip mettait en scène des dizaines de jeunes femmes nues sur des bicyclettes ?) Le morceau est marqué par son passage à la sonnette de vélo qui précède le pont instrumental mené par un Brian May, qui comme souvent est à fond sur la pédale. (votre zombie va boire un verre d'eau et revient en meilleure forme).
  If You Can't Beat Them est un morceau de John Deacon toujours assez à l'aise dans ce genre d'exercice rythmé et légèrement funky. La chanson est plutôt positive est enjouée, elle porte également quelques uns des germes d'un Another One Bites the Dust à venir même si les ajustements ne sont pas tout à fait au point. A noter que le solo de Brian May est l'un des plus longs de la carrière du groupe.
   Let Me Entertain You est l'un des grands moments de l'album dont il donne tout à fait le ton et l'ambiance. Freddie Mercury y apparaît en meneur de revue (en cuir), énumérant toutes les exubérances que le groupe propose à ses fans pour les satisfaire, y compris chanter en japonais comme dans le Teo Torriate de A Day at the Races. Le morceau est marqué par une rythmique puissante et un riff de guitare imparable et aggressif. Brian May se lache particulièrement tout au long de cet album, se montrant plus audacieux et spontanné semble-t-il que sur certains solos trop sages de ses précédentes composition. Nous assistons donc à un morceau de cabaret hard-rock exécuté avec talent et conviction. Le morceau trouvera une place idéale lors des concerts du groupe, s'adaptant de façon on ne peut plus cohérente à l'exercice du live. Si le morceau exprime à lui seul l'ambition de cet album, nous n'avons pas encore tout entendu.
   Dead On Time redouble d'aggressivité pour la suite des événements. Brian May prouve qu'il peut faire de réelles prouesses dans un style proche du thrash-metal dont le nom n'existe même pas encore. Le riff de cette chanson est déconcertant de virtuosité et d'efficacité et Freddie Mercury n'est pas en reste lorsqu'il déclame à un rythme des plus soutenus les paroles venimeuses de cette chanson. La rythmique n'est pas laissée pour compte, John Deacon suit de près un Roger Taylor à la batterie plus en forme que jamais, s'acquittant bien plus qu' honnorablement du duel auquel le guitariste le convie. Le batteur brille réellement sur ce titre. Le groupe entier semble être gagné par une frénésie qu'il ne retrouvera jamais sur aucun autre titre du groupe. Le solo de guitare intègre quelques éléments du riff du lointain Keep Yourself Alive peu avant que le titre lui même ne soit cité par les paroles. Il ne faudra ni plus ni moins que le tonnerre lui même (crédité au nom de dieu dans les notes de l'album) pour stopper cette furieuse machine.
  In Only Seven Days vient pourtant faire retomber le soufflet. Peut-être pas très heureusement, car même si les paroles de John Deacon qui est l'auteur de cette chanson, sont plutôt ingénieuses, elles n'en sont pas moins relativement mièvres. L'album nous avait un peu échaudé jusqu'à maintenant et cette chanson est une touche de fraîcheur qui arrive hélàs un peu trop tôt. Freddie Mercury y chante joliement accompagné majoritairement par une guitare accoustique, un piano et une basse et une batterie discrète. Décrivant un chagrin d'amour après les vacances, ce morceau semble malheureusement peu à sa place malgré sa qualité certaine.
   Dreamer's Ball de Brian May poursuit néanmoins dans cette direction apaisée, apportant sa part d'originalité. La chanson est un blues majoritairement accoustique soutenu par la guitare plaintive de Brian May. Freddie Mercury s'y pose en chanteur(se ?) de bar enfumé de La Nouvelle Orléans. Les choeurs y sont particulièrement bien orchestrés, ajoutant une ampleur et une chaleur toute particulière à ce morceau. Il s'agit d'une chanson d'amour désespérée dans laquelle l'amoureux au supplice espère retrouver l'être aimé dans ses rêves, ne pouvant l'atteindre dans la triste réalité. Ce morceau dénote par son ton de blues désuet, mais il s'inscrit dans les toutes meilleures réussites du groupe par sa sincérité et le plaisir non dissimulé du groupe à l'interprèter. Lors des concerts, il se changera en un moment de complicité entre le groupe et son public.
  Fun It est un morceau assez typique de Roger Taylor à cette époque. Rythmée et à tendance disco sur les bords, la chanson est partagée entre le batteur et Freddie Mercury qui chantent chacun leur tour. Encore une fois, les germes de Another One Bites the Dust sont présentes, mais pas encore développés d'une façon qui puisse réellement marquer les esprits.
   Leaving Home Ain't Easy est une composition de Brian May. La chanson est une ballade mélancolique toute en retenue interprétée par Brian May lui même avec un peu d'aide des choeurs. L'atmosphère du morceau est teintée d'amertume autant que de determination, les paroles évoquant le départ du foyer familial. Le guitariste est particulièrement inspiré sur ce morceau pourtant peu ambitieux, sa voix convient parfaitement au sentiment qu'il souhaite faire passer dans sa chanson, l'atmosphère intimiste qu'il y crée fait de cette chanson l'une de ses plus belles réussites du genre.
  Don't Stop Me Now ajoute un nouvel hymne pour les concerts du groupe. Freddie Mercury plus motivé que jamais commence au piano un morceau des plus entrainants et un des plus gros succès du groupe. Sans laisser retomber la pression une seconde, il déclame sa détermination contagieuse à profiter un maximum des plaisirs de la vie. La chanson reprend bon nombre d'ingrédient typiques du groupe, avec bonheur, le piano fièvreux de Mercury, les harmonies vocales à trois voix caractéristiques et un solo efficace. C'est ce morceau qui conclut au mieux l'album, résumant les ambitions festives du groupe, et donnant un aperçu fidèle de l'ambiance générale du reste du disque.
  More of That Jazz vient pourtant contredire ce fait, il s'agit en effet de la véritable conclusion de l'album, qui aurait peut-être mieux fait de s'arrêter là. Roger Taylor peine à nous faire oublier l'euphorie du morceau précédent avec son ton exagérément sombre et concerné. La rythmique y est comme souvent lorsqu'il s'agit des compositions du batteur soutenue et très marquée, aggrémentée par des touches très hard-rock de Brian May. La chose ne prend pas vraiment son envol et ce n'est pas le pot-pourri final regroupant des extraits des morceaux précédents qui viendra améliorer le résultat, au contraire, cela ne fait que renforcer l'idée que cette composition leur est nettement inférieure par comparaison directe. L'avantage est que cela nous donne l'envie de réécouter le reste de l'album.




  Jazz n'est pas l'album le plus célèbre du groupe, ce n'est pas non plus celui qui aura le plus grand succès critique (à l'époque du moins, il sera plutôt descendu en flèche) ni commercial de Queen. Pourtant, c'est assurément l'une de ses plus grandes réussites. Chacun des membres du groupe s'y montre au meilleur de sa forme, dominé par le duo May/Mercury qui rivalise de créativité et de motivation pour des résultats plus que concluants. Le morceau Dead On Time illustre bien cette complicité et cette compétitivité entre les membres du groupe qui ne ménagent pas leurs efforts pour nous démontrer de quel bois ils se chauffent. Si quelques compositions mineures parsèment l'album, elles ne sont jamais vraiment désagréables et ne font au pire que mettre en valeur les morceaux les plus ambitieux . En s'écartant du style parfois un peu dépouillé de l'album précédent, en embrassant le rock le plus lourd que le groupe ait jamais joué, Jazz renoue avec ce qui fait l'identité musicale du groupe tout en apportant quelques indices quant à son évolution à venir.


  Important :  Personne ne joue de synthétiseur sur cet album pas plus que Freddie Mercury ne porte de moustache...pourtant...